Démocratie ou Barbarie

Ils ont résisté

Nareen Shammo, Vian Dakhil, Nadia Murad, Amal Clooney, Abdulah Abbas ...

Le 3 août 2014, Nareen Shammo, une journaliste yézidie, reçoit un appel désespéré de l’une de ses amies, qui vient d’être capturée par l’État islamique. Puis un autre et encore un autre.  La journaliste, l’oreille collée à son portable, prend conscience du drame qui est en train de se jouer. Elle quitte son travail dans une télévision d’Erbil, au Kurdistan irakien et se voue totalement à la libération de ces femmes. Depuis, elle se bat pour que la communauté internationale n’oublie pas. Elle alerte les ambassades, les journalistes, les organisations des droits de l’homme. Elle n’aura pas toujours été écoutée, mais elle reste l’une des premières à s’être battues pour les Yézidis. Aujourd’hui, elle vit en Allemagne.

 

Le 5 août 2014, une députée prit la parole au parlement irakien. En pleurs, elle implora ses collègues d’agir pour empêcher le massacre en cours des Yézidis. « Nous sommes massacrés, notre religion est en train d’être rayée de la surface de la terre. Les femmes sont tuées ou vendues comme esclaves », s’exclama-t-elle. La vidéo fit le tour du monde, qui mit un nom sur la seule députée yézidie du parlement irakien, Vian Dakhil. Depuis elle fait le tour du monde pour plaider la cause des siens.

 

L’un des témoignages les plus émouvants fut celui de Nadia Murad, prix Sakharov 2016, prise en charge aujourd’hui par Amal Clooney, qui réclame avec elle que la communauté internationale reconnaisse que les Yézidis ont subi un génocide en Irak.  Nous avons rencontré cette jeune fille dans un camp de réfugiés au Kurdistan irakien en février 2015. Jamais elle n’avait raconté son histoire, pas même à son frère qui vivait avec elle dans un container. Son témoignage fut publié sous un prénom d’emprunt pour protéger sa famille. Depuis, Nadia Murad a décidé de parler haut et fort. Elle a témoigné aux Nations unies, mis en place un réseau de soutien aux femmes, et a été reçue en audience par le Pape. Début juin 2017, elle est retournée pour la première fois dans son village de Kocho, où elle a découvert en larmes que sa maison familiale était détruite.

 

De très nombreuses femmes et enfants yézidis ont été libérés grâce à des intermédiaires qui ont racheté à Daech les otages. L’un d’eux est Abdulah Abbas, dont la propre famille avait été enlevée. Dans un premier temps, cet homme d’affaires irakien s’est adressé aux Kurdes qui vivaient encore à Raqqa, le fief de l’État islamique. Mais ces derniers ont été expulsés de la ville. Dès lors il a dû tisser des liens avec des habitants qui étaient prêts à racheter les filles et les enfants, avec des passeurs pour les exfiltrer vers les zones kurdes ou la frontière turque. Son réseau s’étendait en Irak, en Syrie et en Turquie. Abbas affirme avoir sauvé de cette façon plus de 320 personnes.

© Johanna de Tessières/Collectif Huma